Faites-vous partie de ces personnes pour qui manger est un véritable calvaire, une perte de temps ; attendant l'invention d'une pilule futuriste à ingérer en guise de repas ? Ou plutôt de ces épicuriens à l'affût d'une occasion de se retrouver tous autour d'une table, pour prendre le temps de déguster ?
« Bien manger » est vécu différemment selon les personnes et les cultures. Tantôt fonctionnel, tantôt source de plaisir, l'acte de « bien manger » oppose une nourriture du quotidien, vitale, à une nourriture « festive », plus soignée, plus longue à préparer, tels les repas en famille ou amis.
Manger pour vivre…
D'un côté, manger est perçu comme une nécessité vitale. L'homme est contraint tout au long de sa vie de se nourrir, afin d'apporter les calories et apports nutritionnels nécessaires au bon fonctionnement de son organisme. Dans le modèle culturel protestant et nordique européen, « bien manger » se réfère à une responsabilité individuelle, à l’alimentation au service de la santé
2. Par cette vision découle l'importance d'une alimentation diététique et équilibrée, mais aussi le désir d’aller au plus rapide pour exécuter le repas comme un devoir, et ainsi limiter le temps consacré à cette activité. Il en résulte un contrôle nutritionnel et temporel, en dépit du plaisir. Avec l'émergence de l'industrie alimentaire, au XXe siècle, s'accentue la régulation de la pousse et la production des aliments, pour une rentabilité de production, des apports nutritionnels, de l'esthétisation (
→ Lire l'article Valoriser la différence et l'inclusivité… dans notre alimentation !) ; générant un contrôle encore plus fort de ce que nous mangeons.
…Vivre pour manger
De l’autre côté, manger est vécu comme un acte hédonique : agréable, source de plaisir et de bien-être. Les plats sont faits maison ; on prend le temps de cuisiner, de déguster en pleine conscience et d’explorer de nouveaux goûts. Au sein du modèle culturel catholique et méditerranéen, « bien manger » est relatif au plaisir partagé de manger ensemble, c’est une activité conviviale entrant dans les normes sociales. Plus qu'une simple étape dans l'alimentation, il est une pratique qui tisse le lien social.
Contrôle nutritionnel et plaisir gustatif, pensez-vous que ce soit incompatible ou conciliable ?
1. Illustration : Évolution des typologies des consommateurs selon les réponses à la question « si je vous dis bien manger, à quoi pensez-vous ? », source Philippe Chemineau (dir), Comportements alimentaire. Choix des consommateurs et politiques nutritionnelles, Versailles, Quæ, 2012, p. 22-23
2. Philippe Chemineau (dir), Comportements alimentaire. Choix des consommateurs et politiques nutritionnelles, , op.cit., p. 6